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Actualités diocésaines : toutes les actualités du Diocèse de St Claude
Le Père Raymond Monnoyeur, administrateur du diocèse de Saint-Claude,
Les prêtres, les diacres et les animateurs en pastorale,
vous invitent à partager leur prière et leur espérance
à l’occasion du décès du
Père Henri VIVANT
survenu le 11 novembre 2020 à l’âge de 85 ans, dont 59 ans de sacerdoce.
Compte tenu des contraintes sanitaires, ses obsèques seront célébrées
dans la stricte intimité familiale lors de l’Eucharistie
le lundi 16 novembre à 14h30
en l’église de Beaufort.
Qu’il repose dans la paix du Seigneur qu’il a fidèlement servi.
Le P. Henri Vivant (1935-2020)
Lorsqu’on demandait au P. Henri Vivant comment il se portait, il donnait invariablement cette réponse : « Toujours vivant ! » et il en souriait, heureux de son petit effet. Eh bien non, Henri, cette fois-ci, c’est bel et bien fini ; on ne t’entendra plus nous répéter que tu es bel et bien vivant.
Il y a quelques années, Henri avait eu la bonne idée de raconter sa vie en une cinquantaine de pages agrémentées de photos : 50 ans de ma vie de prêtre (1961-2011). N’hésitant pas à déborder ces dates, Henri racontait sa vie, sa naissance à Orbagna au sein d’une famille très modeste – « Ce n’était pas le Pérou ! », écrivait-il - cinquième d’une famille de onze enfants. Dès que les gosses étaient jugés assez grands, ils devaient gagner leur croûte et c’est ainsi qu’Henri s’est retrouvé berger dans une ferme isolée de la Petite Montagne. En mars 46, rentrant à Orbagna, il confie à ses parents son désir de ne plus être berger car il n’est pas heureux là-bas, loin de tout, avec un patron peu sympathique. C’est alors que… « Mes parents avec le curé ont combiné de me mettre au séminaire. » Il est heureux à Vaux, Henri : il y a les copains, le foot. S’il n’est pas un fort en thème, il se rend compte que, ma foi, il ne se débrouille pas trop mal avec les études. Après Vaux, direction Montciel, avec les confrères de sa classe, les Marcel Bride et autres Gilbert Roux. Mais là, les études, c’est autre chose qu’à Vaux : « La philosophie, passe encore, mais la théologie, alors là, c’était de l’hébreu. » Nous sommes avant Vatican II. L’Eglise connaît un bouillonnement intellectuel et pastoral qui ne pouvait pas ne pas toucher les grands séminaires. Est-ce avec ces idées qui datent que l’on fera de nous de bons prêtres ? se demande Henri. « On avait l’impression qu’on continuait à nous former comme on avait formé les prêtres du XIX° siècle. » Revenu du service militaire, en 1959, retour au grand séminaire pour achever la formation... Expérience redoutable pour ces adolescents revenus adultes de la guerre d’Algérie, à qui le règlement interdit d’écouter la radio, d’aller dans la chambre d’un copain… Ces gaillards avaient frôlé la mort et on continuait à les infantiliser.
Henri est ordonné prêtre à la Noël 1961. Il est nommé vicaire à Saint-Claude, à la cathédrale, au sein d’une équipe de prêtres qui deviennent des amis. En 1969, Mgr Flusin le nomme à Arbois – « C’était le moment où l’on croyait aux équipes de prêtres. » -, en compagnie des pères Jacques Fouchard et Bernard Bouraux. Il y passera dix-huit ans, des « belles années » qu’il n’oubliera pas. L’été, il est moniteur de colonies, à L’Ile d’Yeu puis à Rougemont. C’est alors que « l’état-major de l’évêché » lui propose de quitter Arbois pour Saint-Laurent-en-Grandvaux où il exercera son ministère de prêtre – et de chauffeur de bus, comme il l’avait fait à Arbois -. Après neuf années passées dans le Grandvaux, Henri, éprouvé par des problèmes de surdité, vient habiter à Lons-le-Saunier. Il remplit alors de multiples missions : gardien des lieux, à la Maison des Œuvres, puis à Montciel à partir de 1999, secrétaire de la Mutuelle Saint-Martin, référent au service de la catéchèse, aide-bibliothécaire. Le dimanche, il officie en paroisse, à la demande de tel ou tel confrère.
J’ai évoqué plus haut, en passant, le service militaire. Il faut y revenir. Né en 1935, Henri a fait partie des centaines de milliers de jeunes Français qui sont allés en Algérie. Les quatre mois qu’il y a passés, en 1957, l’ont marqué à jamais. Bidasse au 35ème R.I., il se souvenait de la cinquantaine de camarades qui avaient trouvé la mort, notamment de son ami Canot. Le 25 mai 1957 restera une date marquante pour Henri, là où il a failli perdre la vie au cours d’une embuscade. Contrairement à beaucoup d’anciens combattants qui ne parlent jamais des horreurs qu’ils ont vécues, Henri n’hésitait pas à parler de sa guerre, surtout pour mettre en garde les jeunes générations. Quand il était prêtre à Saint-Laurent, il racontait aux enfants du caté la saleté de la guerre. Il avait appelé ce temps de mémoire « En rose sur la carte » car il se souvenait qu’avant la décolonisation les colonies françaises étaient représentées en couleur rose.
Comme le disait Henri : L’histoire, ce n’est pas toujours celle dont on parle le plus ; c’est surtout l’histoire de tous ces « pousse-cailloux » qui vivent comme ils peuvent et qui font ce qu’ils peuvent. Riquet ! Tu as été un bon « pousse-cailloux » et pour la première fois, tu me fais de la peine.
Saloperie de virus !
Pierre Compagnon